Source Database: 
NT2
Source Entry URL: 
Source Entry OAI-PMH Identifier: 
oai:nt2.uqam.ca:34478
Author(s) of the Source Entry: 
Galand, Sandrine
Source Entry Language(s): 
French
Description(s): 

Eveline, fragmentos de una respuesta est une oeuvre arborescente de Marina Zerbarini qui porte l'internaute au coeur d'une matrice de textes, d'images et de sons où les lectures possibles se multiplient. L'oeuvre, comme l'annonce l'artiste sur la page d'accueil, s'inspire de Eveline et de A painful Case, deux courts textes de James Joyce abordant, entre autres, les questions de l'amour impossible, des rendez-vous ratés, des lieux de passages et du corps.En se servant du Web, du jeu sur la subjectivité qu'il permet et de l'aléatoire de ses hypertextes, l'Eveline de Zerbarini demeure fidèle à l'esthétique bien particulière de Joyce ainsi qu'aux thèmes soulevés dans ses deux textes. L'oeuvre est construite à partir de 400 données différentes (textes, images, vidéos et sons), données divisées en une quizaine de catégories (pour n'en nommer que quelques unes: Fugacidad, Confirmación, Eveline, Bitácora, Mariposa, Los otros, Imagenes, Retrato, Un triste caso, Arraigo, Devenir, Señales). À son entrée sur le site, l'internaute peut choisir d'explorer six de ces catégories à la fois, lesquelles se modifient à chaque rechargement de la page. En fonction de la catégorie élue, l'utilisateur effectue à nouveau une navigation aléatoire entre les multiples photographies, vidéos et animations archivées par l'artiste.Parmi toutes les possibilités de catégories, cinq se détachent du lot. Les catégories Eveline et Un triste caso renvoient exclusivement à du texte, plus précisément à des extraits des récits de Joyce, en anglais ou en espagnol, tirés de sites Web divers y faisant référence. Los otros invite les internautes à télécharger leurs propres images pour ainsi devenir des amis d'Eveline (los amigos de Eveline). La catégorie intitulée Mariposa propose un dialogue avec un personnage virtuel, Eveline, personnage questionnant l'internaute et organisant aléatoirement ses réponses en un cadavre exquis sous le thème des rencontres fortuites ou des lieux de passage. Il est intéressant de noter que «mariposa» en espagnol signifie papillon puisque, une fois sur le site, le curseur se transforme en papillon, comme si Eveline, personnifiée par l'insecte, guidait l'utilisateur dans son exploration de l'oeuvre. La dernière catégorie distincte est Bitácora, que l'on pourrait traduire par «registre». Elle renvoie à une page du site blogger.com où des sujets de conversations sont lancés autour de l'oeuvre Eveline, tant celle de Zerbarini que celle de Joyce. Une telle catégorie a été pensée, explique l'artiste, afin d'inciter les internautes à participer à l'écriture de l'oeuvre en donnant leur opinion, leurs idées, et qu'ils passent de spectateurs à utilisateurs (prog:ME, 2005).Les autres catégories allient photographies, animations et vidéos. Alors que les vidéos sont des créations de Zerbarini, les photographies – analogiques et numériques – proviennent non seulement de sa collection personnelle, mais également de sites Web proposant une réflexion sur l'histoire de l'Art argentine et européenne. Pour Zerbarini, ces «images entretiennent une relation métonymique aux textes de Joyce [...] et les vidéos permettent à la fois d'interrompre et d'initier la narration de ces récits» (prog:ME, 2005 - Notre traduction). L'ambiance sonore, quant à elle, est créée à partir de compositions de Guillermo Pozzati et de Philip Glass retravaillées par Zerbarini. Le côté interactif de l'oeuvre est surtout mis de l'avant par les diverses animations permettant à l'internaute de manipuler des représentations 3D de corps humains.Dans nombre de ses créations, Zerbarini s'intéresse aux relations entre êtres humains et machines. Il n'est donc pas innocent que le corps humain soit au coeur de l'interactivité d'Eveline. Les corps qu'y manipule l'internaute n'ont presque plus rien d'humain – ils sont schématisés, voire robotisés, dénués de visages – alors qu'Eveline, femme virtuelle avouée (l'utilisateur est bien averti qu'elle n'est qu'illusion), paraît presque humaine par les questions sensibles qu'elle soulève dans ses "conversations" avec l'internaute.Nous pouvons dire qu'Eveline est une oeuvre Web classique puisqu'elle reprend «un des éléments essentiels de l'art Web, [qui] est sans contredit l'importance accordée à l'écriture, une écriture composite et figurativisée, intégrant images, sons, éléments graphiques. Les mots y sont à la fois chronique (une histoire est racontée) et matière (formes visuelles ou poétiques variables)» (Lalonde, 2006). Devant les multiples navigations offertes, les lectures se décuplent, et le lecteur n'est jamais que lecteur. Il devient, à son tour, créateur:As artists, we waive authorship, meaning and discursive linearity. We leave the reader alone and disoriented in a jungle of binary values without any meaning in and of themselves. The reader, in exile, is then obliged to recreate the meaning. [...] The Reader to come will be one who, having been exiled from meaning and linearity, fought against the arbitrariness of hypertext and managed to build his own meaning, made his own writing, and was transformed into an artist (Zerbarini, 2007).En rendant les textes de Joyce interactifs, collectifs et visuels, Eveline s'inscrit dans cette recherche d'un «reader/writer», comme le nomme Zerbarini, et s'offre non pas comme un territoire achevé, mais bien qui reste à construire. En terminant, notons qu'une seconde version de l'oeuvre, qui permettrait à chaque utilisateur d'enregistrer les cadavres exquis composés par Eveline et de visualiser ceux des internautes précédents, est annoncée sur le site, mais n'est toujours pas disponible à ce jour.