Source Database: 
NT2
Source Entry URL: 
Source Entry OAI-PMH Identifier: 
oai:nt2.uqam.ca:34453
Author(s) of the Source Entry: 
Gauthier, Joëlle
Source Entry Language(s): 
French
Description(s): 

*kunstrad1o : 1o : 1o : v1suelles rad1o: scrabble mit döhl*, hébergée avec le soutien du Curatorium du canton d’Aargau (Suisse), est une œuvre réalisée par l’artiste suisse Beat Suter en collaboration avec le programmeur René Bauer. Il s’agit d’une relecture de plusieurs autres œuvres hypermédiatiques d’artistes germanophones : Log-Book of a Common Journey de Johannes Auer, Der Schrank. Die Schranke de Martina Kieninger, piep-show – around the world in a minute de Sylvia Egger, tango rgb d’Oliver Gassner, et le site Web des éditions cyberfiction de Suter lui-même. Cette relecture, pensée comme un « scrabble à étages multiples avec l’auteur du texte source (Suter et The Absolute Wreaders, 2004) », est effectuée à partir de das buch gertrud de Reinhard Döhl. Suter propose ainsi une « visualisation concrète » des projets d’Auer, Kieninger et les autres à l’intérieur du cadre conceptuel et esthétique de Döhl ; das buch gertrud sert de base pour créer des scripts, et ces scripts sont ensuite appliqués aux œuvres qui deviennent alors code source de *kunstrad1o : 1o : 1o : v1suelles rad1o: scrabble mit döhl*. Par exemple, derrière une série de mots qui défilent à l’écran, repose tout un processus d’évaluation et de compilation linguistique qui permet de trouver les équivalents picturaux d’une œuvre source sur le Net avant de retransformer ces équivalents en cybernuages textuels.Dans la première section, des détails biographiques concernant Reinhard Döhl sont fragmentés comme autant d’entrées partielles à l’intérieur d’un journal de voyage et se superposent à d’autres fragments, légèrement travestis, issus des entrées automatiques de Log-Book of a Common Journey de Johannes Auer. Ceux-ci traversent l’écran, viennent à s’arrêter, forment des groupes accidentels, etc. La deuxième section est un collage de différents passages de Der Schrank. Die Schranke de Martina Kieninger et d’images qui réfèrent à des mots tirés de ceux-ci, un peu au hasard. Ici, les mots et les images se superposent, s’accumulent et forment des taches, rendant la lecture linéaire impossible tout en encourageant une expérience « générale » du texte concret. La section suivante, consacrée à Sylvia Egger, reprend le contenu textuel de piep-show – around the world in a minute sous une forme « dadaïste » (fragmentée, colorée, entrecoupée d’images sans logique apparente) avec la possibilité d’afficher un « commentaire » sur le sujet en arrière-fond. Or, ce qui est présenté par l’artiste comme « commentaire » se révèle être le texte lui-même, réorganisé… Encore une fois, l’accumulation visuelle des divers éléments entrave la lecture au profit de l’expérience esthétique concrète. La quatrième section, qui reprend le tango rgb d’Oliver Gassner, offre une transposition de l’image en mots : ce qui était chez Gassner un ensemble de couleurs dansant sur un échiquier devient ici fragments de phrases qui se déplacent par saccades de gauche à droite de l’écran. Finalement, la dernière section décompose c1berf1ction.ch de Beat Suter. Les mots que l’on retrouve sur le site Web de Suter se promènent de façon aléatoire à l’écran (déplacements latéraux), formant au passage des cybernuages : les phrases plus longues, aériennes, en noir sur fond blanc, surplombent les mots isolés, sur fond gris, empilés au bas de l’écran comme des immeubles.*kunstrad1o : 1o : 1o : v1suelles rad1o: scrabble mit döhl* est bien sûr issu du projet The Famous Sound of Absolute Wreaders. C’est ce qui explique cet intérêt de Suter pour les œuvres de Döhl, Auer, Kieninger et les autres. Dans le cadre du projet, ces artistes devaient proposer chacun une œuvre (celles reprises par Suter) et produire, à partir des œuvres des autres, une nouvelle création. Les questionnements soulevés par la démarche de Suter sont donc communs à l’ensemble du groupe de The Famous Sound of Absolute Wreaders : perte de contrôle sur le texte à travers la médiation de la machine, performance du lecteur, pratiques de collage-mixage, possibilité du « multitasking », etc. L’œuvre principale ayant été attribuée à Suter, das buch gertrud, explique aussi la perspective théorique particulière adoptée pour *kunstrad1o : 1o : 1o : v1suelles rad1o: scrabble mit döhl*, très proche des idéaux du Groupe de Stuttgart auquel appartenait Reinhard Döhl. Pour reprendre un extrait du manifeste du Groupe : « Nous parlons d'une poésie expérimentale, dans la mesure où nos réalisations singulières respectives impliquent vérifications et falsifications esthétiques. Nous parlons à nouveau d'une techne poïétique. Nous parlons encore d'une esthétique progressiste, ou plutôt d'une poétique qui démontre la mise en application des avancées de la littérature, comme il en va déjà toujours du progrès de la science. (Bense et Döhl, 1964) » L’approche est avant tout ludique, mais aussi technique, ancrée dans la programmation elle-même.Bref, l’œuvre de Suter permet d’explorer la rencontre d’un double discours : discours sur les possibilités ouvertes par les pratiques de lecture et de relecture d’une part, et discours sur le mariage de la techne et de la poiésis de l’autre.